
C’est un fait.
Les sites de trading ont envahi les stades de foot !
La liste des clubs ayant établi des partenariats avec ces sites est longue comme le bras : FC Barcelone, Manchester City, Tottenham, Atlético Madrid, etc…
Dans un contexte financier très précaire, notamment des suites de la crise du COVID-19, l’argent des sites de trading est vu comme une manne salvatrice.
Mais l’intérêt des fans rentre-t-il seulement en considération dans cette histoire d’amour naissante ?
Il est permis d’en douter !
Or, l’activité de trading n’est pas un service comme les autres, car les risques de perdre sa chemise sont bien réels.
Focus sur l’entrée fracassante des sites de trading dans le football.

Le dangereux précédent des options binaires
Le loup est entré dans la bergerie de la Ligue 1 en 2016.

Dans le rôle du prédateur, des sites de trading spécialisés sur les options binaires, et dans le rôle du gibier, les fans de football.
Plus spécifiquement, les partenariats qui ont défrayé la chronique sont les suivants :
- Paris : Optionweb
- Lyon : 24option
- Monaco : EZ Trader
- Nice : InteractiveOptions
- Saint-Etienne : Investing Area
Qu’est-ce qui pose problème ?
Tout d’abord, le trading du pétrole, de la paire EUR/USD ou de l’action Air Liquide n’est pas une activité sans risque.
En réalité, le métier de trader demande beaucoup de compétence, de discipline et d’expérience.
Pour ces raisons, le trading ne concerne en France qu’une minorité de personnes.
Or, adosser sa marque au maillot d’un club, c’est l’assurance pour un site de trading de toucher une cible populaire et très large.
Le portrait-robot du trader est bien loin !
Alors, pourquoi ces marques prendraient-elles le risque de toucher une cible si éloignée de leur coeur de métier ?

Au préalable, il faut rappeler que le trading au sens large comprend énormément de possibilités, des plus raisonnables aux plus risquées.
Par exemple, voici deux “trades” avec des niveaux de risque aux antipodes :
- 1 000€ à long terme dans un fonds de placement spécialisé dans des obligations d’entreprises
- 1 000€ sur le cours du pétrole dans les 15 prochaines minutes
Malheureusement, les sites d’options binaires se placent sans contestation possible dans la deuxième catégorie.
En fait, comme nous expliquons dans notre article consacré aux similitudes entre jeux d’argent et trading, la pire erreur que puisse commettre un trader débutant est de confondre trading et casino.
Or, c’est précisément ce que sont les sites d’options binaires : des casinos déguisés.
Ainsi, faire un pari sur une option binaire revient à parier sur le noir ou le rouge à la roulette, sachant que dans tous les cas de figure, le vert tombe dans la poche du courtier.
Mais avec les options binaires, plutôt que de parier sur une couleur, le “trader” choisit un actif (pétrole, or, une action, un indice, etc…), un seuil à atteindre (à la hausse ou à la baisse) ainsi qu’une expiration (en minutes, en heures et plus rarement en jours).
Si la valeur de l’actif atteint le montant souhaité à l’expiration de l’option, le trader double sa mise, diminuée de la commission du courtier.
Dans le cas contraire, tout est perdu.
Deux points à retenir :
- Tout d’abord, le casino gagne systématiquement à la fin
- Ensuite, les options binaires sont généralement des paris à très court terme, ce qui veut dire que le trader évolue à une échelle où il est pratiquement impossible de réaliser des gains. Ce n’est pas pour rien que des sociétés de gestion dépensent des fortunes pour gagner des centièmes de seconde sur l’exécution des transactions…
Bref, en gardant à l’esprit que pour un trader expérimenté, l’intérêt d’une option binaire est pratiquement nul (éventuellement pour couvrir une position dans des cas très précis), la valeur ajoutée pour une personne non initiée est tout simplement négative.
Par contre, il est vrai que la rentabilité est au rendez-vous pour les sites de trading… De quoi inciter à l’augmentation de la base de clients.
Et dans ce sens, les fans de football sont une cible rêvée, car déjà consommatrice de jeux d’argent, notamment de paris sportifs.
Ainsi, en se liant avec les clubs les plus populaires de France, l’objectif est donc de convertir des joueurs de paris sportifs vers les options binaires, sachant que ce n’est qu’un jeu de roulette déguisé.
Et pour dire la vérité, observer un graphique qui monte ou qui descend vers l’objectif voulu est une expérience très grisante, susceptible de mener vers des risques d’addiction.

Ce qui explique notamment pourquoi la France interdit la publicité pour le casino.
Or, en jouant d’une législation immature à ce sujet, ces sites d’options binaires basés à Chypre sont parvenus à contourner la loi pour s’adresser au plus grand nombre…
Un cocktail explosif rendu possible par l’inconscience des clubs de football qui ont volontairement fermé les yeux.
Car ce n’est pas tout.
Outre mettre en danger les finances de leurs supporters, ces clubs ont fait preuve de beaucoup de légèreté dans le processus de vérification de ces nouveaux sponsors.
En effet, à l’image de l’Olympique Lyonnais et 24Option, certaines de ces sociétés ont reçu des amendes de la part de leur autorité de régulation, la Cysec.
Or, l’autorité de régulation chypriote n’est pas la plus reconnue quand il s’agit de prendre des sanctions contre ses membres.
Heureusement, face à un tel pied de nez, les autorités françaises n’ont réagi rapidement, d’abord en suspendant la société 24Option pour ne pas respecter l’intérêt de ses clients français, puis par le passage de la loi Sapin II qui a interdit les options binaires en France.
Une mesure d’une incroyable dureté et prise dès 2017 pour faire face à un danger de santé publique très réel.
Voilà qui n’arrive pas souvent et qui souligne à quel point les clubs de football incriminés ont fait passer l’état de leurs finances avant toute autre considération…
Le retour des sites de trading sur les terrains de foot
Si les sites d’options binaires ont pratiquement disparu de la circulation, l’industrie du trading voit toujours dans le football un levier d’acquisition majeur.

Mais qu’entendons-nous exactement par industrie du trading ?
Au sens large, nous divisons les courtiers en deux catégories :
- Les courtiers pour investir à long terme, comme Boursorama, Fortuneo, BNP Paribas, CIC, etc…
- Les courtiers pour faire des profits à court terme, comme IG, eToro, XTB, Avatrade, etc…
Dans le premier cas, les clients possèdent généralement des portefeuilles composés d’actions.
Dans le second, l’offre est essentiellement constituée de CFD, des produits très simples d’utilisation pour parier à la hausse ou à la baisse sur tous les actifs imaginables (cours de l’or, du pétrole, des indices, bitcoin, actions, etc…).
Pour schématiser, nous avons donc les investisseurs d’un côté, et les traders de l’autre.

Or, à l’exception notable du courtier DEGIRO sponsor du club allemand de Mönchengladbach, les courtiers de la première catégorie ne font que très peu de sponsoring sportif.
Pourquoi ? Parce que leur clientèle composée d’investisseurs est beaucoup moins active en termes d’opérations réalisées, et donc globalement moins rentable.
En revanche, les traders sont potentiellement beaucoup plus rentables, du fait de volumes de transactions beaucoup plus élevés.
De plus, comme nous avons vu précédemment, un mauvais trader ressemble beaucoup à un joueur de casino. C’est-à-dire qu’il est susceptible de déposer beaucoup d’argent et de tout perdre, surtout s’il a connu une expérience positive à ses débuts…
Bref, si les courtiers spécialisés dans les CFD ne sont pas des arnaques par défaut comme l’étaient les sites d’options binaires, le risque de pertes en capital est tout aussi réel.
C’est pourquoi la législation française est très stricte à ce sujet, puisque la publicité pour les CFD est tout simplement interdite.
Fin du problème ?
Pas tout à fait, car les supporters français sont toujours susceptibles de tomber sur des publicités pour des sites de trading.
Comment ?
Tout d’abord, à l’échelon européen, la loi est généralement plus souple envers les sites de trading.
Par exemple, au sein de la Premier League anglaise, pas moins de 16 des 20 clubs qui la composent ont noué des partenariats à des degrés divers avec ce type de service (voir la liste plus bas).
Or, la Premier League est très suivie partout dans le monde, et bien entendu en France.
Autant d’opportunités qui se représentent avec les championnats espagnols, italiens, etc… et bien entendu pendant les coupes d’Europe.
Par exemple, dans cette dernière compétition, le courtier Plus500 a acquis une grande notoriété grâce à son sponsoring de l’Atlético Madrid.

Mais ce n’est pas tout.
Des publicités sont également visibles sur les pelouses de Ligue 1.
Comment est-ce possible ?
L’interdiction de communiquer concerne les CFD, désignés comme les principaux responsables du risque de perte en capital aux yeux du législateur.
Mais cela ne remet pas en cause la publicité pour le courtage plus conventionnel, comme l’achat et la vente d’actions.
Or, si un site d’abord reconnu pour son offre de trading ajoute l’investissement en actions dans son offre, un des effets positifs de cette décision stratégique est l’ouverture des portes de la publicité, et donc du sponsoring sportif.
C’est donc sur cette base que le principal partenariat de Ligue 1 à l’heure actuelle a été signé entre l’AS Monaco et eToro.
Mais les ambitions d’eToro dans le football français ne s’arrêtent pas là, puisque le courtier apparaît également sur de nombreux panneaux publicitaires à l’intérieur des stades.
Va-t-on assister à un durcissement de la loi pour contrer ce type de publicité ? Ou au contraire, cet argent va permettre de contribuer à sauver le football français, menacé économiquement ?
Une chose est sûre, c’est que le rôle de précurseur d’eToro est suivi attentivement par tous les sites de trading.
Le cas eToro
Dans le listing des partenariats entre clubs de football des 5 grands championnats européens et sites de trading, le nom eToro apparaît à de multiples reprises.

Avec 6 clubs de Premier League, c’est le plus actif en Angleterre, tout en étant très présent en Allemagne et aussi le pionnier en France.
Qu’est-ce qui différencie eToro des autres sites de trading ?
A s’y pencher de plus près, ce n’est pas le fruit du hasard, car ce courtier est aussi bien réputé pour ses campagnes de marketing agressives (par exemple l’ancien partenariat avec Gaël Monfils) que pour sa plateforme de trading spécialement adaptée aux débutants.
Or, dans le monde de trading, il est juste de dire qu’aucun site ne rivalise avec eToro sur ce point, tant les efforts réalisés ne datent pas d’hier : logos des entreprises apparents, gros boutons, absence de fonctionnalités très techniques, facilité de navigation, trading social, etc…
Ainsi, parmi les sites de trading “grand public”, eToro est clairement celui qui possède les meilleures armes pour séduire.
Mais à quel prix ?
Nous avons réalisé une grande étude sur les frais d’eToro.
Il en ressort que si pendant ses premières années (la société a été créée en 2007), la simplicité d’utilisation allait de paire avec tarifs très élevés, au point que le mot “arnaque” était souvent associé, les données ont évolué.
Ainsi, depuis l’introduction de l’offre d’actions (avec la particularité d’être sans commission), le courtier est une démarche de recherche de respectabilité, que ce soit par le sponsoring sportif, des campagnes de publicité dans les grands médias financiers, des innovations (dans les cryptomonnaies, cartes de crédit, etc…) et bien entendu par une baisse drastique des tarifs.
Un mouvement de fond est donc en cours pour présenter eToro en tant que fintech.
Mais il n’empêche : le coeur de métier de la société reste le trading, une activité particulièrement risquée.
Ainsi, tous les fans de football ont-ils les compétences nécessaires pour tirer avantage de l’offre d’investissement en action particulièrement aguichante en évitant les pièges du trading ?
Dans une société où la responsabilité individuelle est souvent mise en avant, le débat est lancé…
La liste des partenariats (à jour de décembre 2020)
Premier league :
- Tottenham : Libertex
- Manchester City : Avatrade
- Everton, Leicester, Southampton, West Bromwich, Crystal Palace : eToro
- Arsenal : AKFX
- Liverpool : TigerWit
- Burnley, Fulham, Sheffield, Brighton : nope
- Manschester United : SwissQuote
- Wolverhampton : Samtrade FX
- Aston Villa : Skilling
- West Ham : Scope Markets
- Chelsea : GO Markets
- Newscastle : ICM
- Leeds : FX VC
Liga :
- FC Barcelone : FBS
- FC Valence : Libertex
- Atlético : Plus500
- Real Madrid : easyMarkets
- FC Seville : everfx
Ligue 1 :
- Paris : HotForex (partenaire régional, c’est-à-dire pour des marchés hors de France)
- Monaco : eToro
Serie A :
- Inter Milan : IC Markets
- Milan AC : ROInvesting
- Roma : FXORO
- Lazio : StormGain
- Atalanta : Plus500
Bundesliga :
- Monchengladbach : DEGIRO / Flatex
- Wolfsburg, Union Berlin, Francfort, Augsbourg : eToro
Article écrit par Emilien FRANCOISE
Emilien FRANCOISE est le fondateur de Nextbanq, site de référence dans l'univers des finances personnelles.
Titulaire d'un diplôme de grande école de commerce, il écrit des contenus indépendants à temps plein depuis 2007 avec l'ambition d'aider tous les lecteurs à améliorer leur pouvoir d'achat.
